Polygraphe(s) n°6
Futurs des écritures
Catherine ZASK
Dans les images de Catherine Zask j’y vois des écritures que l’on imagine intermédiaires. Comme ces signes préalphabétiques trouvés à l’entrée des mines de turquoise dans le Sinaï, longtemps considérés comme les embryons d’une écriture sémitique. Mais à mieux y regarder, sur certaines feuilles ce seraient plutôt des signes d’apparat, on croirait des logogrammes gravés sur bronze.
Le caractère archéologique de ces signes pourrait préfigurer de futures découvertes qui viendraient bientôt bouleverser nos savoirs (comme le déchiffrement récent du vieil élamite), relancer des débats. Ou au contraire les seules traces d’une écriture sans futur, abandonnées devant un système devenu dominant.
Ces signes engagent immédiatement nos mémoires nourries des planches de la Grande Histoire de l’Écriture de Marcel Cohen, ou de grands albums épigraphiques. On ne sait s’ils viennent de relevés dessinés, d’estampages, ou, peut-être, de photos d’inscriptions presque effacées.
Finalement, en regardant l’ensemble des planches, on penche pour un proto alphabet chinois qui aurait accompagné les logogrammes les plus anciens. (Découverte sensationnelle)
Les caractères de Catherine Zask, comme son œuvre toute entière en témoigne, vibrent d’une méditation sur les signes les plus récents, comme son fameux alfabetempo (1993), mais aussi sur la profondeur d’une histoire de l’écriture inachevée, lacunaire pour toujours.
Béatrice Fraenkel