Blanche Lagrange
Les interactions entre la Flandre et l’Angleterre au tournant de l’an mil ont entraîné des déplacements d’individus, notamment dans le milieu monastique. Certains manuscrits témoignent de la mobilité d’un artiste anglo-saxon et de son itinéraire à travers le continent. Le manuscrit enluminé à l’abbaye flamande Saint-Bertin (Boulogne-sur-Mer, Bibliothèque municipale, manuscrit 11) copié par des scribes flamands, contient des enluminures réalisées par cet artiste anglo-saxon itinérant et séjournant dans ce monastère. Loin de se conformer à la culture visuelle carolingienne, alors réinterprétée dans l’art flamand, l’artiste est resté fidèle à son propre héritage culturel : silhouettes élancées, drapés bouillonnants et cadres décorés sont autant d’éléments qui déterminent la tradition visuelle anglo-saxonne. Pour réaliser ce manuscrit, les moines flamands ont établi une relation de collaboration avec l’artiste anglo-saxon séjournant dans leur monastère. Au tournant des xe et xie siècles, les institutions anglo-saxonnes et flamandes interagissent de manière intense. Les échanges culturels sont tels que les artistes flamands assimilent les motifs anglo-saxons pour créer un nouveau langage visuel : le monastère bertinien est un véritable creuset artistique, à l’aube du XIe siècle.
Mots-clés : Enluminure, manuscrits, scriptoria flamands, art anglo-saxon, réseau monastique, voyage, transfert culturel